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Visages d'hier

22 juillet 2010

Adam et Eve

Voilà, très modestement, une critique de Navamalika, Isit, Iléana, Servilia, Adam, Eva et les autres… (Adam si Eva en version originale), un roman écrit en 1925 par Liviu Rebreanu.

Adam_Eve

Le récit commence avec un dénommé Toma Novac agonisant sur son lit d’hôpital. Entretenant une relation avec la jeune et belle Iléana, Toma s’est fait surprendre dans les bras de sa maîtresse par le mari outragé qui s’est vengé en tirant sur son rival.

 

Dans un éclair de conscience Toma se remémore sa rencontre avec Aléman, un vieil homme très croyant. Au cours de plusieurs entrevues Aléman lui a longuement détaillé sa spiritualité de la vie et de l’amour (qu’il associe intimement, l’un n’allant pas sans l’autre) : deux âmes sœurs doivent s’incarner  dans une enveloppe matérielle (un homme et une femme) pour s’unir charnellement. Et c’est ce vers quoi ces deux âmes poussent inlassablement les mortels dans lesquelles elles se retrouvent. Toutefois des obstacles tels que l’histoire ou les conditions sociales s’opposent à l’union des âmes : une seule vie humaine ne saurait les réunir. C’est pourquoi à la mort des protagonistes les âmes  changent de réceptacles et en sautant le temps et l’espace prennent possession de deux nouveaux humains. Cette réincarnation doit avoir lieu sept fois pour qu’enfin les deux âmes spirituelles s’unissent matériellement et charnellement.

 

S’ensuivent alors sept passionnants chapitres, qui sont autant de nouvelles sur les différentes réincarnations de deux âmes. Ainsi, dans l’ordre d’écriture nous suivons les passions contrariées de :

 

Navamalika, promise au roi Arjuna, et Mahavira, disciple d’un brahmane, à Hastinapour dans l’Inde du vingt-deuxième siècle (approximativement) avant notre ère.

 

Isit, favorite du pharaon, et Unamonu, monarque de la ville sainte d’Abotu, dans l’Egypte ancienne de la quatrième dynastie (celle qui a laissé les plus célèbres des monuments de -2670 à -2450 avant J.-C.).

 

Hamma, capturée, violée, emprisonnée par le chef rebelle Iluma-Ilum et Gungunum, scribe de la reine à Babylone, en Mésopotamie sous le règne du roi Samsu-Iluna (-1750 à -1712 av. J.C).

 

Servilia, une jeune esclave, et Axius, un chevalier et philosophe romain dans la Rome de l’empereur Tiberius (14 à 37 après J.-C.).

 

Une mystérieuse Maria (la Vierge Marie?) et Adéotus, moine au monastère de Lorsch, dans l’Allemagne Moyenâgeuse (687 à 701, pontificat du Pape Sergius).

 

Yvonne Collignon de Gargan, une jeune aristocrate catholique, et Gaston Duhem, un médecin et athée intransigeant,  tous les deux sur le point de se faire guillotiner dans la ville d’Arras tourmentée (ou éclairée, c’est selon l’appréciation) par la terreur de la Révolution Française

 

Iléana, une jeune et belle femme mariée et Toma Novac, un professeur de philosophie, dans une Bucarest contemporaine de l’écriture du roman.

 

Chacun de ces différents épisodes est passionnant, l’immersion dans le lieu et dans l’époque du récit est parfaite, notamment grâce au soin tout particulier accordé  à la description des lieux, des coutumes, sans doute le fruit d’un important travail de documentation de la part de l’auteur. Bref on est emporté, on voyage, tant historiquement que géographiquement.

 

Les héros de ces histoires sont des hommes en recherche (d’un sens à leur vie, qui est en fait leur âme sœur), qui s’interrogent, qui préfèrent la lecture, la philosophie ou la science à d’autres choses plus pragmatiques et rémunératrices. Souvent sceptiques face à la religion (Gaston Duhem et Toma Novac principalement) ils remettent en cause leur certitude et se laissent gagner par la foi à l’approche de la mort, donnant l’occasion à une belle réflexion sur l’au-delà.

 

On pourrait reprocher un léger manque de profondeur aux personnages féminins, mais la rencontre entre les deux êtres, le "coup de foudre" comme on pourrait vulgairement l’appeler, est si bien retranscrit, dans la remise en question des certitudes des deux êtres (comme une métaphore des difficultés des âmes à s’unir), que l’on pardonne volontiers à l’auteur.

 

La fin de la plupart des nouvelles est souvent cruelle, dure et violente, notamment pour les trois premières, un peu à l’image de l’idée que l’on se fait de ces périodes antiques. La rencontre entre les deux âmes est très condensée –ce qui ne veut pas dire bâclée– et n’occupe qu’une maigre place dans les chapitres se déroulant au Moyen-Âge et pendant la Révolution Française, sans doute par volonté de l’auteur de ne pas trop se répéter. Cette brièveté du point culminant de la nouvelle est compensée par une description passionnante et extrêmement instructive de l’époque concernée, tout particulièrement, en tout cas pour un français, le tableau du régime de la Terreur pendant la Révolution Française, qui fait froid dans le dos.

 

Pour conclure ce roman traite de l’amour bien sûr, mais aussi de la recherche du sens de la vie, de la foi, et est parfois un roman philosophique. Le texte est extrêmement riche et dense, ce qui est à souligner pour des nouvelles (même s’il est impossible de les lire séparément) et passionnant, assurément l’un des quatre chefs d’œuvres d’un auteur qu’il convient de recommander à tous.

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15 octobre 2008

Liviu Rebreanu

Je me propose de poster une petite biographie de Liviu rebreanu, un auteur que je trouve passionnant. Cela ne sera pas du luxe vu le peu de références que l'on peut trouver en Français sur Rebreanu! J'ai trouvé cet excellent article sur le site du Courrier des Balkans.

Liviu Rebreanu, le fondateur du roman moderne roumain

Romancier, poète, éditeur, Liviu Rebreanu (1885-1944) est un des écrivains majeurs du XXème siècle et le plus grand écrivain roumain de l'entre-deux-guerres. Il a aussi dirigé le Théâtre national de Bucarest et la Société des Ecrivains roumains, ce qui conduit ses compatriotes à le considérer comme le véritable fondateur du roman roumain moderne et comme un véritable monument national.

Elève roumain, hongrois, allemand

Aîné d'une famille d'instituteurs qui comptait quatorze enfants, Liviu Rebreanu est né à Târlisua (département de Bistrita-Nasaud), aux confins orientaux de l'empire austro-hongrois sur le déclin, en Transylvanie, où vivent, à côté des Roumains majoritaires, des populations hongroises et germaniques. Son père reçoit souvent à la maison la visite du grand poète roumain George Cocbuc (1866-1918), qui est son ami. La formation du jeune Liviu reflète la diversité ethnique de sa province natale. Il fait ses classes d'abord à l'école où enseigne son père, à Maieru, puis successivement dans un lycée roumain, hongrois et allemand, à Bistrita, avant d'entreprendre des études supérieures à Budapest.

Officier de l'Armée impériale austro-hongroise

Malgré sa passion pour la médecine, le manque d'argent le pousse vers la carrière militaire. Un choix obligé qui pèsera à la fois sur sa destinée et sur son oeuvre. En 1905, il est promu officier de l'Armée austro-hongroise, envoyé en poste à Gyula, mais découvre très vite que sa vocation est ailleurs. C'est l'écriture. A la veille de la Grande Guerre, l'effondrement de l'empire multinational se profile. Déjà les Roumains, frustrés par l'administration hongroise qui les exclut des affaires publiques, tournent le regard vers le petit royaume danubien qui s'est constitué de l'autre côté des Carpates, où vivent réunis leurs frères en latinité des provinces de Moldavie  et de Valachie. Liviu Rebreanu démissionne de l'armée.

Liviu_Rebreanu_dessin

Dépositaire d'une culture centre-européenne, il gagne en 1909 la Roumanie, indubitablement sa véritable patrie, ainsi que le note le critique Edgar Reichmann dans la présentation qu'il lui consacre. C'est là que s'exprimera son grand talent d'écrivain.

« Sois grand comme Cocbuc »

Avant qu'il ne franchisse clandestinement les montagnes, son père l'emmène jusqu'à la gare, lui lançant du quai « Sois aussi grand que Cocbuc ! » Quelques mois plus tard, il sera arrêté, extradé et emprisonné à Guyla, à la demande des autorités austro-hongroises qui n'ont pas apprécié les conditions de son départ. Libéré en 1890, il rejoindra aussitôt Bucarest.

Liviu_Rebreanu_vieille_photo   Liviu_Rebreanu_vieille_photo_2

Malgré son origine roumaine, Liviu Rebreanu avait commencé par s'exprimer en hongrois. En réapprenant sa langue maternelle, le romancier entendait, sans plus, renouer avec les siens, tout en affirmant son identité nationale. Ayant grandi dans un empire où l'intolérance était moindre que dans les pays voisins, il ne tombera jamais dans le piège de la dérive chauvine. Pour lui, partagée entre deux cultures et deux types de société, la Transylvanie demeure une seule terre, où plusieurs peuples, créateurs et porteurs de spiritualités devraient s'épanouir ensemble et non pas les uns contre les autres. Son premier roman, Ion, est publié en 1920, après la réunification de cette province avec le Royaume roumain, à la faveur du Traité de Versailles.

Liviu_Rebreanu_peinture

Si ce texte, dont il a écrit la première version pendant l'occupation de la Roumanie par l'Allemagne, plonge ses racines dans les tensions sociales au sein d'un village transylvain, La forêt des pendus, paru peu après (1922), raconte la tragédie d'un jeune officier roumain de l'Armée impériale, contraint de tuer d'autres Roumains pendant la Première Guerre mondiale. Le soulèvement paysan de 1907 inspire La Révolte.

Liviu_Rebreanu_tableau

Avec ses romans, Liviu Rebreanu s'impose d'emblée comme le plus important créateur épique de la nouvelle Roumanie. De l'autre côté des Carpates, en ce pays danubien qui deviendra le sien, au nord des Balkans, l'écrivain découvre une réalité sensiblement différente de celle qu'il a connue en Transylvanie. Certes, ses compatriotes vivent dans leur propre Etat, mais la misère des campagnes reste extrême. Loin de Vienne et de Budapest, Bucarest, en marge de l'Europe, fait figure de capitale bâtarde où règne le charme de l'esprit français mêlé aux langueurs orientales. Le soulèvement paysan de 1907 contre les propriétaires terriens qui dépensent le produit de leur labeur en Occident, inspire à l'auteur La Révolte (1932), grande fresque de l'affrontement entre les maîtres du Royaume et leurs serfs dépourvus du minimum nécessaire pour survivre. Depuis son arrivée en Roumanie, la création de Liviu Rebreanu se situe en ce lieu, au milieu de la plaine étendue au sud des Carpates, où se heurtent les traditions du monde villageois et la sophistication citadine, surgie avec la modernité.

Liviu_Rebreanu_photo_2

Mort deux jours avant l'entrée de l'Armée Rouge dans Bucarest


A 47 ans, l'écrivain a alors achevé ses oeuvres principales. Plus concentrée, plus analytique, son roman Madalina, conçu quelques années plus tôt (1927), rappelle davantage, par sa force dramatique, les textes de l'Autrichien Stefan Zweig (1881-1942), enracinés dans le milieu viennois et le freudisme, que les monumentales constructions réalistes, à l'architecture rigoureuse et impeccable, auxquelles ses lecteurs étaient habitués, ainsi que le souligne Edgar Reichmann. Reçu à l'Académie roumaine en 1939, il y prononcera son discours d'intronisation, intitulé « Eloge du paysan roumain », dans le droit fil de son oeuvre, qui dresse une fresque de l'amour violent ou déchirant que portent à leur terre ceux qui vivent de ses entrailles ou veulent la rejoindre.

Liviu_Rebreanu_ann_e_de_sa_mort   Liviu_Rebreanu_derniere_photo_avant_sa_mort

Grand fumeur, Liviu Rebreanu disparaîtra le 1er septembre 1944 des suites d'un cancer de la gorge, à Valea Mare, à l'âge de 59 ans. Deux jours après que l'Armée Rouge ait fait son entrée dans Bucarest et que la Roumanie qu'il avait tant aimée ne disparaisse dans le bloc soviétique.

Par Dolores Sirbu-Ghiran, mars 2007.

Voilà, j'espère que ça vous a intéressé et que vous avez appris des choses!

12 octobre 2008

Visages d'hier

Bienvenue sur le blog de "Visages d'hier"!

Visages d'hier est un blog qui a pour but de faire connaitre la littérature d'Europe de l'Est en général, et de Roumanie et de Bulgarie en particulier (j'ai vécu dans ces deux pays magnifiques, je les aime beaucoup!).

A bientôt!

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